• " Le costume du XIXe siècle est détestable. Il est sombre, déprimant. Le péché est la vraie touche de couleur de la vie moderne. "

    Pour celles qui préfèrent le café noir au lait fraise , j'imagine qu'elles ont déjà entendu parler d'un des Irlandais les plus connus de la littérature anglaise, un Dandy à la réputation sulfureuse, contemporain et ami de Sir Arthur Conan Doyle : Oscar Wilde. Celui-ci avait déjà écrit nombre d'articles de journaux, d'essais, de pièces de théâtre, de contes et de nouvelles... Mais de roman, point. Jusqu'en 1891, année où il publie Le Portrait de Dorian Gray. Ce sera le seul ouvrage de ce type dans sa bibliographie et son oeuvre la plus détestée à l'époque de sa parution.

    ( Une petite digression avant d'attaquer et parce qu'il fallait ab-so-lu-ment que j'inclue ça quelque part *radio Momo ON* : pour la petite anecdote, Oscar Wilde s'est fait piquer une femme qu'il courtisait par Bram Stoker, l'auteur de Dracula, qui s'est marié avec elle (Bram, pas Dracu). A part ça, Wilde a écrit que l'oeuvre de Stoker était "le beau roman du siècle", preuve qu'il n'était pas rancunier. :-D HUM, ça y est, c'est fini *radio Momo OFF* )

    Je n'aime pas trop en révéler sur l'intrigue d'un récit : n'est-ce pas enivrant que de se plonger dans un livre dont on ne connaît que vaguement les tenants et les aboutissants ?  Alors disons juste que l'histoire implique un personnage nommé Dorian Gray et un portrait, le sien. Ca vous aide beaucoup, n'est-ce pas ? :-]

    Intéressons-nous plutôt à la palette de personnages que nous offre l'auteur. En dehors de Basil Hallward, le seul à être à peu près normal (ennuyeux ?) et part qui l'histoire commence mais ne finit pas, on trouve Lord Henry Wotton, Harry pour les intimes, un Dandy à l'état pur. Poseur, cynique, "prince du paradoxe", chacune de ses phrases est à citer dans les dîners mondains. Tellement en représentation qu'on peut en être exaspéré, il aime choquer, dit beaucoup mais ne fait jamais. Néanmoins, c'est lui qui influencera dans l'ombre les pensées et les actes de Dorian, le considérant même comme un "objet d'étude". Seule une certaine duchesse lui tiendra tête dans des dialogues plein d'esprit qui rappellent les conversations galantes d'autrefois. Sans parler du troublant jeune homme autour de qui tourne l'intrigue, un bel Adonis du nom de Gray, blanc, pur voire inconsistant au début, qui se grisaillera de plus en plus pour devenir d'un noir d'encre à la fin, sacrifiant tout pour un idéal de beauté et de jeunesse.

    J'ai aimé dans ce roman sa dimension fantastique par le fameux tableau, qui représente parfaitement l'âme de notre Apollon. Le Portrait... explore ainsi les tréfonds de l'essence humaine et sa relation au Péché, dans un traitement à la fois métaphysique et artistique. On retrouve d'ailleurs ces thèmes dans une nouvelle célèbre de Robert Louis Stevenson, L'Etrange Cas du Docteur Jekyll et de Mister Hyde, avec une Londres Victorienne aussi sombre et aussi fascinante (J'en parlerai plus précisément à l'occasion). J'ai également adoré le rapport de l'auteur à la Beauté, l'Art et le Plaisir qui transparaît à chaque page, ici par l'évocation d'un parfum, là par une tirade pleine de verve de Lord Henry ou encore par les occupations des protagonistes (opéras et dîners chics au menu). Par ce "roman Dandy" par excellence, Oscar Wilde nous fait part d'une conception esthétique particulière qui ne manquera pas d'interpeller une Lolita.

    Seul fausse note, un chapitre 11 un peu lourd de part ses nombreuses énumérations et références (trop) pointues. Il permet cela dit de mieux comprendre la psychologie de Gray tout en nous renseignant sur son auteur, ce qui, au vu du manque d'action que cette partie représente, me fait l'effet d'être assez accessoire.

     

    Une adaptation cinématographique est parue cette automne dans les pays anglophones. Ce film, rebaptisé Dorian Gray, a été réalisé par Oliver Parker (qui s'était déjà intéressé à une pièce de Wilde en 2oo3), avec Ben Barnes (Le Monde de Narnia) en Dorian et Colin Firth (Le Drôle de Noël de Scrooge, à l'affiche cette semaine) en Harry. But sooo sad, aucune sortie française n'a été annoncée pour l'instant !


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