• "Toute histoire comporte une morale, dès lors qu'on se donne la peine de la trouver"

     

    Bon. Dans mon post du 6 avril, lorsque j'espérais que la tendance "Alice" puisse profiter à des artistes peu connus du grand public, je pensais déjà à Ödland et aux Sumire mais aussi, et parce que son dernier livre venait de sortir, à François Amoretti ! Quoi, nous sommes le 23 mai à présent ? Hum, et bien, mieux vaut tard que jamais (en parlant de retard...). 

    Histoire de nous rafraîchir la mémoire, rappelons qu'une nouvelle édition d'Alice au Pays des Merveilles est parue en mars dans la collection Blackberry chez Soleil, dans le même format que Gothic Lolita. Nouvelle édition voulant dire nouvelle traduction, par Martine Céleste Desoille, mais aussi nouvelles illustrations avec ce cher Amoretti, qu'il est inutile de présenter ! Je ne m'attarderais pas sur la traduction, principalement car je ne me souviens pas de celle que j'ai lu lorsque j'étais enfant et que la version qui trône depuis un moment dans ma bibliothèque est encore différente. De plus, ce blog a pour but de s'attarder sur la partie Lolita des oeuvres présentées, discutons alors des dessins d'un des artistes les plus connus de ce mouvement en France !

    M. Amoretti abandonne pour un temps les couleurs franches de son précédent livre pour l'aquarelle et encore plus de noir et blanc, et voit ainsi confirmée son habilité à jongler avec différentes techniques tout en gardant un univers propre que l'on commence peu à peu à cerner. Ici, l'on remarque une volonté affichée de respecter au plus près les illustrations de John Tenniel, qui a travaillé sous les indications extrèmement précises de Lewis Carroll. L'illustrateur y a cependant ajouté sa petite touche personnelle. Une Alice Lolita bien sûr. Des macarons Eat Me. Mais regardez d'un peu plus près et vous y verrez des poulpe-fraises et des compositions qui ne sont pas sans rappeler un certain Chaperon Rouge, sa première oeuvre auto-publiée... Avec comme toujours, un sens du détail très appréciable et un soin que l'on trouve jusqu'au grain du papier. Bref, quelque chose de très moderne mais une nostalgie rêveuse, tout ce qui fait l'art de notre Aixois favori.

    Justement, la Alice qu'il nous présente correspond totalement à cette description. Bien sûr, elle est blonde et garde la robe bleue et le tablier qui en font son gimmick. Mais elle est Lolita, c'est-à-dire une fille ancrée dans son époque. Une Lolita qui a bien poussé qui plus est, puisque c'est une jeune femme, voire une adolescente. Le fait d'avoir choisi de l'habiller ainsi ne fait donc pas de l'héroïne une enfant, comme le précise François sur son blog. Le changement est discret, soit, mais très significatif. A un premier niveau, il peut signifier qu'Alice Au Pays des Merveilles est aussi un livre destiné aux plus grandes, ce qu'on s'empressera d'approuver au vu de toutes les variations qui existent sur ce thème. Cependant, nous nous trouvons ici en présence d'un livre illustré et non d'une réécriture, dont la traduction est certes inédite, éloignée des sentiers battus ("un thé chez les fous" devient "un thé de la compagnie des dingues"), mais offre tout de même un décalage frappant entre la personnalité d'Alice, dix ans, selon Carroll et celle d'Alice, vingt ans, selon Amoretti. Vous me suivez ? Alice semble plus douce et plus mûre en dessin que par écrit, et c'est une chose qui ne m'aurait pas frappée autant si l'une et l'autre ne s'étaient opposées sur une même page.

    Je trouve cette interprétation plutôt risquée finalement, en particulier envers les Lolita qui, pour certaines, pourraient ne pas se reconnaître à travers le caractère de ce personnage, quelle que soit sa version. En même temps, je pense comprendre la démarche d'Amoretti : Alice au Pays des Merveilles a beau être un conte qui ne plaît pas à toutes les Lolita, il reste que c'est une oeuvre qui a profondément influencé ce mouvement, tant d'un point de vue esthétique que dans son imaginaire. Le Lolita lui devait donc bien un petit hommage, un vrai, que le lecteur lambda pourrait trouver dans n'importe quelle librairie du coin. Et ça, c'est une petite victoire pour nous. J'aime l'idée que le Lolita se soit faufilé dans un classique de la littérature anglo-saxonne.

    Notre communauté en général a aussi de quoi profiter d'une telle production. Celles qui n'ont jamais lu l'oeuvre de Lewis Carroll pourront s'instruire sur ce pilier de la culture Lolita tandis que les plus avisées se replongeront dans ses sources. Et qui sait ? Cela ameutera peut-être une future génération de Rori tout comme Gothic Lolita- Princesses d'Aujourd'hui a peut-être pu l'être.

    Finalement, l'atmosphère de cet Alice au Pays des Merveilles correspond plutôt bien au Lolita de François Amoretti : très doux mais un peu sucré, rêveur mais un peu fou, très féminin et discrètement original. Il n'a pas besoin d'être tapageur pour avoir sa place parmi toutes les publications sorties à la même période. Ce n'est pas forcément ma vision de l'oeuvre, tout comme chacune possède sa propre interprétation de ce qu'est le Lolita pour elle, il n'empêche que cet univers m'a emporté plus loin que certains n'ont pu le faire, mine de rien. J'en attends donc beaucoup de son prochain livre illustré, qui sera une réédition de son fameux Chaperon Rouge de Charles Perrault ! 

     

    Blog de François Amoretti

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